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Le retour en vol après le confinement

10 juin 2020

Le retour en vol après le confinement

Contribution de Sophie Dufresne, instructeur classe 1 chez Cargair (CYMX) et vice-présidente, Services aux membres chez Aviateurs.Québec

École de pilotage de Cargair à Mirabel, retour en opération le 1er juin 2020.

Beaucoup me demande si je trouve ça trop tôt le retour en vol. Compte tenu des restrictions encore en vigueur, il faut dire que la question a du sens. C'est trop tôt si on compare au travail du personnel soignant, qui est au front sans relâche depuis le début de cette crise. Mais si on regarde en avant et que l’on constate l'impact que le manque de pilotes finissants pourrait avoir, je pense ici aux patrouilles de feu, à AirMedic et compagnie, je comprends qu'il est important que ce retour ait lieu.

Donc aujourd'hui nous avons effectué un retour dans les airs à notre base de Mirabel. C'est comment voler après le confinement?  C'est beaucoup, beaucoup de mesures. C'est comme pour aller à l'épicerie: il faut s'armer de patience car il y a des délais, et il faut se soumettre de bons coeurs aux protocoles sanitaires.

Donc, en arrivant, il faut respecter le protocole d'entrée: s'il y a quelqu'un devant nous dans le portique ou à la répartition, on attend dehors. On ne doit pas arriver plus de 15 minutes d'avance et on doit quitter tout de suite après. Pas de flânage.

Quand c'est notre tour, on entre, avec notre masque bien en place. On devra le garder jusqu'à notre départ. On remplit notre déclaration journalière:les mêmes questions qu'on a répondu des dizaines de fois depuis la pandémie: a-t-on des symptômes, avons-nous été en contact... La seule question qui semble avoir disparu est: avez-vous été à l'étranger dans les 14 derniers jours ? Je pense que le monde commence à être gêné de la poser celle-là.

On fait prendre notre température frontale. Ça ressemble à un fusil et à chaque fois j'ai le goût de dire: haut les mains. Sûrement le stress du protocole...

Une fois que l'on a ''réussi'' ces 2 étapes: on remplit le registre des entrées. (Pour aider à retracer les contacts, au cas où). On devra ensuite signer de nouveau ce registre à la sortie. Finalement, on procède rapidement à l'entrée de vol, prendre les documents et la clé, prendre la lingette pour désinfecter les contrôles de l'avion et hop, on sort sans délai.

À l'avion, on fait le walk around normalement, avec un masque. Si vous avez des lunettes, ça va buer. On a nettoyé les contrôles comme il faut. On peut faire le briefing prévol. Normalement ce briefing a lieu à l'intérieur, mais c'est un des protocoles: pas de cours ni de salle de cours. Donc s'il fait beau, qu'il ne vente pas trop et qu'il n'y ai pas trop d'avions qui tournent autour, on le fait dehors. Sinon, dans l'avion.

Et on s'envole! Premier constat à Mirabel: le nombre d'avions stationnés sur la 11-29 est d'une tristesse! Combien de temps avant que notre aviation revienne à la normale?

Sinon, le reste de notre envolée est assez similaire à ''avant'', si on finit par oublier le masque. Les communications sont peu affectées par les masques jetables, un peu par ceux en tissus plus épais, mais toujours lisibles. Les lunettes buées sont le problème. On les relève pour faire entrer l'air, sans toucher au masque. Ou on pense à apporter une lunette antibuée ou un produit à mettre sur les lunettes pour contrer la buée.

Quand on fait plusieurs vols par jours, avec très peu d'intervalles entre les deux, comme c'est le cas des instructeurs post-confinement, le masque, jumelé à l'altitude semble causer quelques symptômes d'hypoxie chez certains instructeurs. Avec comme symptômes: mal de tête, étourdissement léger. Particulièrement les vols en haut de 4000'. Il n'y a pas 36 solutions: espacer les vols plus longuement, rester le plus bas possible en altitude, ne pas faire trop de manoeuvres qui tirent des ''G''. Toutefois ces cas ne se sont pas vus chez les élèves qui effectuent en général des envolées de moins de 2h. Les instructeurs ont adapté leurs journées en conséquence.

Au retour de vol: on debrief à l'avion, ramasse nos trucs, remplit les logs et PTR et hop! on quitte. On ne s'attarde pas à l'intérieur. Tout ce qui peut être manipulé par le répartiteur au lieu de l'élève ou de l'instructeur le sera, pour limiter les contacts. Les lieux communs (toilettes!) seront nettoyés aux 15 minutes. À la fin de la journée, tous les avions seront nettoyés au complet avec un autre protocole rigoureux à suivre.

Donc, voler avec des protocoles sanitaires, c'est faisable? Oui. Il faut prendre le temps, bien suivre à la lettre les recommandations et surtout se rappeler que nous sommes chanceux de pouvoir retourner dans les airs!

 

Source : S. Dufresne


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